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Ex. : Ce fut alors aux Insubriens… à s’enfuir sans regarder derrière soi. (Malh., I, 444.) — Ils (les hommes) ne recherchent… qu’une occupation violente et impétueuse qui les détourne de penser à soi. (Pasc., Pens., I, 52.) — Un grand nombre de gens travaillent pour soi. (Id., Pens., I, 106[1].) — Telles gens par leurs bons avis Mettent à bien les jeunes âmes, Tirent à soi filles et femmes. (La Font., Contes, II, 2,10.) — Certains particuliers… se moulent sur les princes… et se ruinent ainsi à se faire moquer de soi. (La Bruy., I, 283.)

Soi se rapporte aussi à des pluriels de noms de choses, construction évitée dans la langue actuelle et plus fréquente que la précédente au xviie siècle.

Ex. : Des mérites qui n’ont rien de pareil à soi. (Malh., I, 152,15.) — Il avoua que nos Mystères avoient non seulement en soi, je ne sais quoi de terrible… (Balz., Socr. chrét., Disc. VI.) — Peut-on alléguer là-dessus les momens d’humeur et de chagrin que les soins de la grandeur et de l’autorité traînent après soi ? (Mass., Pet. Car., Humanité des Grands, 1.)

E. Au lieu de soi, faisant fonction de sujet, la langue actuelle emploie soi-même.

Ex. : Les alliances avec plus grand que soi sont sujettes toujours à de fâcheux inconvéniens. (Mol., B. G., III, 12.) — On a souvent besoin d’un plus petit que soi. (La Font., Fabl., II, 11,2.) — Il n’est, je le vois bien, si poltron sur la terre, Qui ne puisse trouver un plus poltron que soi. (Id., Fabl., II, 14,33.) — Ce n’est pas soi qu’on voit ; on ne voit qu’une image. (Id., Fabl., VIII, 13,46.) — Cela se passe dans un endroit si intérieur et si intime, c’est tellement soi qui souffre que, etc. (Sév., VI, 206.)

Remarque. L’emploi de soi dans l’exemple suivant est la trace d’un latinisme qui s’était introduit dans l’ancienne langue : Il ne peut ailleurs choisir l’objet qu’il aime, Ni d’un égal à soi faire un autre soi-même. (Rotrou, Bel., II, 4.) Soi accompagné d’une préposition remplaçait dans l’ancienne langue le pronom personnel de la 3e pers. Ex. : Et de quelque côté que je dresse mes pas, La solitude en soi ne se rencontre pas. (Rotrou, Célimène, I, 1.) Soi se rapportant ici à quelque côté est équivalent à y (la solitude ne s’y rencontre pas).

  1. Prise dans son ensemble avec ce qui précède, cette citation ne peut s’appliquer à l’emploi mentionné. Cf. le contexte : Être brave n’est pas trop vain, car c’est montrer qu’un grand nombre de gens travaillent pour soi.