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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/126

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BEAUMARCHAIS.

cynique : il a une morale, sa morale. Quant à Gil Blas, c’est un homme de ressources et d’esprit, mais il est le jouet des événements. « Ses vices, dit Nisard, lui viennent de ses maîtres », et il finit en homme de bien. Figaro, lui, est toujours supérieur aux événements ; il reste imperturbablement le même ; quelles que soient les traverses de sa vie aventureuse. Ses vices lui appartiennent en propre. Il a la passion de la liberté. Il est toujours prêt à la riposte et à la révolte, tandis que Gil Blas considère la marche du monde, attentif à exploiter les faiblesses de ses semblables, mais sans étonnement ni courroux. Mercier, qui n’aimait pas Beaumarchais, a dit une grande sottise en écrivant du Mariage de Figaro : « Cette comédie est tout entière dans Gil Blas ». À Lesage, Beaumarchais n’a emprunté que la fantaisie d’une mascarade espagnole. Figaro est bien à lui, et pour la meilleure des raisons : c’est lui-même.

En retraçant toute l’existence de Beaumarchais et en jugeant sa moralité, nous estimions que cette figure d’homme d’affaires et de lettres était en elle-même assez curieuse pour mériter l’attention. Mais nous avions, aussi, le dessein de découvrir la clef du Barbier et la clef du Mariage. Car dans ces deux comédies, Beaumarchais a mis tout ce que lui avait appris l’expérience de la vie, comme, dans le personnage de Figaro, il a mis