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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/154

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BEAUMARCHAIS.

Mais cet avocat est en même temps un auteur comique : il anime les personnages et les met en scène. Les portraits d’Arnaud de Baculard, de Marin, de M. Goëzman, de Mme Goëzman, sont demeurés célèbres ; la confrontation avec Mme Goëzman est une scène de comédie si parfaite qu’on l’a jouée telle quelle à Versailles sur le théâtre des Petits Appartements ; les dialogues ont une vivacité et un naturel admirables ; les attitudes sont prises sur le vif ; le décor est indiqué en quelques traits justes et pittoresques. Les spectateurs du Barbier de Séville purent applaudir sans surprise ; tous avaient lu le quatrième mémoire et Beaumarchais y était déjà tout entier.

Le sens du théâtre, et même du théâtral, ne lui fait jamais défaut. Regardez plutôt ce bref tableau de la comparution de l’accusé devant le Parlement, toutes chambres assemblées : « En approchant de la salle de la séance, un grand bruit de voix confuses me frappait sans m’émouvoir ; mais j’avoue qu’en y entrant, un mot latin prononcé plusieurs fois à haute voix par le greffier qui me devançait, et le profond silence qui suivit ce mot, m’en imposa excessivement : Adest, adest : il est présent, voici l’accusé, renfermez vos sentiments sur son compte. Adest ! me sonnera longtemps à l’oreille. À l’instant je fus conduit à la barre de la cour. À l’aspect d’une salle qui ressemble à un temple, au peu de lumières qui la rendaient auguste et sombre, à la majesté