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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/155

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SES MÉMOIRES ET SON THÉÂTRE.

d’une assemblée de soixante magistrats uniformément vêtus et tous, les yeux fixés sur moi, je fus saisi du plus profond respect et, (faut-il avouer une faiblesse ?) la seule bougie qui fût sur la table où s’appuyait M. Doé de Combault, rapporteur, éclairant le visage d’un conseiller du Parlement accoté sur la même table, de M. Gin, en un mot (M. Gin était de ses ennemis déclarés), je le crus, par la place où je le voyais, chargé spécialement de m’interroger, et je me sentis le cœur subitement resserré, comme si une goutte de sang figé fût tombée dessus et en eût arrêté le mouvement. »

Dans le style comme dans le caractère de Beaumarchais il y a de l’excellent et du pire, de l’amphigouri et de la naïveté, de l’insolence, de l’incohérence et de l’équivoque.

L’auteur des Mémoires n’a point de culture classique et il abonde en citations latines, comme tous les écrivains qui savent peu le latin. Il a dû, lui-même, forger laborieusement son outil à force de travail et de lectures. On l’a regardé comme une sorte d’improvisateur, et la furieuse activité de sa vie l’a souvent condamné à des besognes hâtives. Mais les innombrables ratures de ses brouillons prouvent qu’il ne se contentait pas du premier jet.

Son imagination était abondante. Les Mémoires sont remplis de charmantes images et de métaphores heureuses. — « La variété des peines et des