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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/188

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BEAUMARCHAIS.

tique des situations. Il serait souhaitable que l’ouvrage fût couronné par une grande idée philosophique, ou même qu’on en fît naître le sujet. Quant à la musique, elle ne remplira qu’un rôle secondaire : le chant devra être simple et privé des beautés qui « allanguissent » l’action. Les chanteurs prononceront avec une grande netteté, et jamais l’orchestre ne couvrira leur voix. Un tel opéra ne pourra donc voir le jour que si, sur les principes comme sur l’exécution, poète et musicien sont absolument d’accord.

Beaumarchais appliqua sa doctrine dans l’opéra de Tarare. Il s’entendait à merveille avec Salieri, son collaborateur. « M. Salieri, disait-il, est né poète, et je suis un peu musicien ». De bonne foi, il crut avoir produit un chef-d’œuvre.

À la vérité, il était « un peu musicien ». Autrefois il avait composé quelques morceaux pour les petits concerts de Versailles. Il improvisait des scènes chantées, un peu hautes en couleur, mais « que les jolies femmes soutenaient fort bien — lui-même s’en vantait — dans le demi-jour d’un salon peu éclairé, le soir, après souper ». Il avait écrit un andante pour la première scène des Deux Amis et des ariettes pour le Barbier de Séville, lorsqu’on devait le représenter à la Comédie-Italienne. Il était donc en mesure de suivre et de diriger le travail de Salieri ; et l’on a publié les brouillons