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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/54

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BEAUMARCHAIS.

avait séduit par son esprit, qu’il amusait par ses saillies, et Vergennes qui appréciait l’ardeur de son zèle et la fertilité de ses ressources. Il écrivait un jour à ce dernier : « J’aime à marcher devant vous, comme David allait devant le Seigneur avec un esprit droit et un cœur pur ». Beaumarchais avait la manie de citer les Écritures hors de propos. Mais il n’en est pas moins vrai qu’en travaillant sous les ordres de Vergennes, il mit dans sa conduite un certain sérieux, qu’on n’est point accoutumé à rencontrer dans le reste de sa vie.

En suivant les séances du Parlement, en écoutant chez lord Rochford et chez Wilkes ce qu’on disait dans les deux camps opposés de la société anglaise, il s’était, dès le mois de septembre 1775, rendu compte de toute la portée de l’insurrection américaine. « Tous les gens sensés, écrivait-il au roi, sont convaincus en Angleterre que les colonies anglaises sont perdues pour la métropole, et c’est aussi mon avis. » Il allait plus loin et il se trompait quand il prédisait que la révolte des colonies entraînerait une révolution à Londres : c’était ne connaître ni l’histoire ni le caractère du peuple anglais.

Après ce premier avertissement, il ne cessa de communiquer, soit au roi, soit au ministre, ses vues et ses observations. Il y a encore quelque verbiage dans ces mémoires ; Beaumarchais y cite avec trop de complaisance Solon, Richelieu, Montesquieu,