Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/145

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ce qu’il est que par référence à son opposé, il est clair que l’opposition des deux corrélatifs ne fait qu’un avec leur nature. Il n’y a pas besoin d’établir que les corrélatifs sont des opposés : ils sont tels évidemment et par définition.

Passons à l’opposition des contraires. Pas plus que l’opposition de l’habitude et de la privation, comme nous le verrons ci-après, l’opposition des contraires ne se confond avec l’opposition des relatifs. D’abord, les choses qui s’opposent comme des contraires n’ont pas leur essence dans le rapport qu’elles soutiennent l’une avec l’autre. On dit bien que l’une est le contraire de l’autre ; on ne dit pas que l’une est ce qu’elle est, de l’autre, ou par rapport à l’autre ; on dit, par exemple, que le bien est le contraire du mal, que le blanc est le contraire du noir ; on ne dit pas que le bien est le bien du mal, ni que le blanc est le blanc du noir, comme on disait que le double est le double de la moitié[1]. En second lieu, les corrélatifs sont ontologiquement simultanés[2]. Il en est tout différemment des contraires : ils peuvent être l’un sans l’autre, ou quelquefois même ils s’excluent réciproquement : si tous les êtres animés se portent bien, alors il n’y a pas de place pour la maladie ; si Socrate se porte bien, il est impossible qu’il soit simultanément malade (Cat. 11, 14 a, 7-14). Voilà comment l’opposition des contraires se distingue de celle des corrélatifs ; nous verrons prochainement comment elle se distingue de l’opposition contradictoire et de l’opposition de l’habitude avec la privation. — Pour aller au fond de la nature de l’opposition de contrariété, voyons comment il faut définir les contraires. La définition la plus vague qu’on puisse donner des contraires est celle qui est présentée comme traditionnelle dans l’Éthi-

    πρὸς τὸ ἀντικείμενον λέγεται, τὴν ἐπιστήμην· τὸ γὰρ ἐπιστητὸν τινὶ λέγεται ἐπιστητὸν, τῇ ἐπιστήμῃ.

  1. Ibid. b, 32 : ὅσα οὖν ἀντίκειται ὡς τὰ πρός τι, αὐτὰ ἅπερ ἐστὶν ἑτέρων λέγεται ἢ ὁπωσδήποτε πρὸς ἄλληλα λέγεται. τὰ δὲ ὡς τὰ ἐναντία, αὐτὰ μὲν ἅπερ ἐστὶν οὐδαμῶς πρὸς ἄλληλα λέγεται, ἐναντία μέντοι ἀλλήλων λέγεται· οὔτε γὰρ τὸ ἀγαθὸν τοῦ κακοῦ λέγεται ἀγαθόν, ἀλλ’ ἐναντίον, οὔτε τὸ λευκὸν τοῦ μέλανος λευκόν, ἀλλ’ ἐναντίον.
  2. Ibid. 7, 7 b, 15 : δοκεῖ δὲ τὰ πρός τι ἅμα τῇ φύσει εἶναι… Cf. infra, p. 147.