Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/179

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est de la subalternation des propositions, qui n’est pas une opposition véritable quoi que semble en penser quelquefois la logique traditionnelle, Aristote, qui ne connaît pas ce nom de subalternes, n’a garde de compter ici une espèce d’opposition. Il professe d’ailleurs que l’universelle contient virtuellement la particulière, et il pense certainement que celle-ci se conclut de celle-là par syllogisme.

Pour en finir avec l’opposition des propositions, il n’y a plus qu’à rappeler l’exception célèbre qu’Aristote admet à la règle des contradictoires, lorsqu’il s’agit des propositions portant sur des futurs contingents (Hermen. ch. 9). Si un événement tel qu’une bataille navale est contingent, c’est-à-dire peut ou non se produire, de deux propositions comme celles-ci « il y aura demain, — il n’y aura pas demain une bataille navale », on ne peut pas dire que, si l’une est vraie, l’autre est fausse, ou réciproquement. Tout ce qu’on peut affirmer, c’est qu’elles s’excluent indéterminément. À supposer vraie l’une quelconque des deux, l’autre est fausse, ou inversement. Mais on ne peut pas dire dès maintenant que l’une des deux déterminément, celle-ci plutôt que celle-là, soit vraie et rejette l’autre dans le faux. Car, à les bien considérer, ni l’une ni l’autre présentement n’est vraie ou fausse. Et en effet : « les discours sont vrais, dit Aristote rappelant sa définition de la vérité, en tant qu’ils se conforment aux choses[1] ». Lors donc qu’un événement n’existe pas encore, et qu’il n’existe même pas comme préformé dans sa cause puisqu’il est contingent, il est clair qu’aucun discours sur cet événement ne peut être ni vrai ni faux et qu’on ne peut pas dire que, tel discours opposé étant vrai, l’autre est faux ou inversement. La question de savoir s’il y a réellement des futurs contingents est tout autre ; mais, s’il y en a, la doctrine d’Aristote sur l’application du principe de contradiction à ces futurs est seule correcte et rationnelle[2].

  1. Hermen. 9, 19 a, 33 : … ὁμοίως οἱ λόγοι ἀληθεῖς ὥσπερ τὰ πράγματα. Pour la définition de la vérité, voir supra, p. 160.
  2. On ne comprend pas que Zeller, p. 220, n. 3, trouve préférable la pauvreté dont s’étaient avisés les Académiciens (cf. Cicéron, De fato,