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ONZIÈME LEÇON


LE RAISONNEMENT

Pour autant qu’elle ne se ramène pas à l’intellection, la sensation n’est pas un savoir, car elle n’est ni vraie ni fausse ; l’intuition intellectuelle est le suprême savoir, inaccessible à l’erreur ; le jugement, qui est vrai ou faux, n’est par lui-même ni un savoir ni l’opposé : il est plutôt une simple position ou affirmation contingente. C’est seulement dans l’opération supérieure de la pensée discursive, dans le raisonnement, que la science reparaît. Tout enseignement de nature discursive, qu’il soit donné ou reçu, comme dit le début des Seconds analytiques, et par là il faut entendre toute science, car ce qui s’enseigne et s’apprend est science (Éth. Nic. VI, 3, 1139 b, 25), toute science discursive donc et même tout ce qui imite la science discursive, provient, soit par le syllogisme, soit par l’induction, d’une connaissance antérieure. En d’autres termes, la science discursive se fonde sur une connaissance antérieure où elle trouve une garantie que le simple jugement ne présentait pas, et l’opération, par laquelle la science se fait en s’appuyant sur les connaissances antérieures, est le raisonnement. Car l’induction, sur laquelle nous aurons à revenir plus tard, participe elle aussi de la nature du raisonnement, et, quant au syllogisme, il est pour Aristote le type du raisonnement par excellence. C’est le syllogisme que nous allons étudier dans cette leçon, en essayant tout d’abord de voir comment et pourquoi une conclusion est quoique chose de scientifique, alors qu’on ne peut pas en dire autant d’un jugement, puis aussi de dégager le principe du syllogisme