Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ges du jardin il se promenait en s’entretenant avec ses élèves : c’est de cette coutume (περιπατεῖν), et non de l’existence, commune à l’Académie et au Lycée, d’une galerie ou promenoir (περίπατος), que provient le nom de Περιπατητικοί, sous lequel on désignait les disciples d’Aristote ; du reste cette dérivation se justifie seule au point de vue de la langue. Il est difficile pourtant de croire que cette coutume fût constante, et que le maître n’y renonçât pas quand son auditoire devenait trop nombreux. D’après Aulu-Gelle, il donnait deux sortes de leçons, consacrant à la philosophie celles du matin, à la rhétorique, celles de l’après-midi[1]. — Quelle était, d’autre part, sa méthode d’exposition ? Zeller semble croire que c’était le dialogue socratique et qu’il n’y renonçait que par exception. Mais, d’abord, il semble bien que les témoignages contredisent cette manière de voir : les expressions dont se servent Cicéron, Aulu-Gelle, Diogène impliquent la continuité de son discours, et, en outre, Aristoxène dit formellement qu’Aristote indiquait le sujet et traçait le plan de sa leçon, avant de développer les points de détail[2]. D’autre part, chez Platon lui-même, nous assistons à une transformation de la méthode socratique d’enseignement par le dialogue : l’importance de la forme dialoguée diminue progressivement et les derniers écrits de Platon sont presque des traités ex professo. Au reste, entre un tel procédé et les tendances générales de la méthode d’Aristote, il paraît bien y avoir une incompatibilité essentielle. Le dialogue suppose la maïeutique, ou, ce qui en est l’équivalent platonicien, la réminiscence : il s’agit seulement de se reporter à une sorte d’évidence intime. Pour Aristote, au contraire, enseigner c’est démontrer ; il a l’idée du moyen-terme et de la preuve ; nul besoin d’un retour sur soi de l’auditeur, ni qu’on lui demande son assentiment : on le contraint. — Notons enfin que, pour son

  1. Sur ces divers points, voir Zeller, p. 29 (surtout n. 3-5) et 30 (surtout n. 1).
  2. Cf. Zeller, p. 30 sq. Les textes auxquels on vient de faire allusion sont cités par Zeller lui-même, p. 31, n. 2 (cf. 30, 3) et 3 ; p. 30, n. 2.