Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/255

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nous proposons inversement de descendre du plus général au plus particulier, nous aboutissons à des espèces dernières et aux individus. Enfin on ne saurait interposer entre un mineur, ou sujet, et un majeur, ou attribut, une infinité de moyens-termes ; car, si les attributs qu’un sujet possède par soi sont en nombre fini, le plus dérivé de tous ces attributs, médiatisé par tous les autres, ne l’est jamais que par un nombre fini de moyens {ibid. I, 19-22)[1]. Mais dire que la série des propositions par lesquelles on arrive aux conclusions dernières est finie, cela revient à professer qu’il y a un autre savoir que le démonstratif, puisque la démonstration suppose avant elle des points de départ et aboutit à des termes devant lesquels elle expire. — Cette connaissance, dans laquelle la science proprement dite plonge par ses deux extrémités, nous pouvons dire que c’est la connaissance immédiate. Ce nom de connaissance immédiate, si plein de signification chez Aristote, s’applique expressément aux pensées qui fournissent à la science ses points de départ. Implicitement il convient aussi aux pensées qui marquent le terme de la démonstration. Car les termes derniers, les ἔσχατα, synonymes des καθ’ ἕκαστα, sont, comme les termes primordiaux, étrangers à la discursion et, comme eux, relèvent de l’intellect, bien que, à la différence des termes primordiaux, ils tombent sous la sensation[2]. Nous verrons d’ailleurs à propos de l’induction, que les ἔσχατα sont principes à leur façon comme sources des principes. Il était donc juste de dire que la science est bornée de part et d’autre par la connaissance immédiate. — Aussi, après avoir étudié la notion de la science suivant Aristote, avons-nous à nous occuper aujourd’hui du savoir immédiat, en tant qu’il vient en aide à la science. De ce point de vue apparaît l’unité du triple objet de notre leçon : les axiomes, les définitions, l’induction.

  1. Voir Zeller, p. 234, n. 8 et p. 235.
  2. Éth. Nic VI, 9, 1142 a,  : … τοῦ ἐσχάτου, οὗ οὐκ ἔστιν ἐπιστήμη ἀλλ’ αἴσθησις… 12, 1143 a, 36 : καὶ γὰρ τῶν πρώτων ὅρων καὶ τῶν ἐσχάτων νοῦς ἐστὶ καὶ οὐ λόγος… Sur l’équivalence de τὰ καθ’ ἕκαστα et de τὰ ἔσχατα, cf. Bonitz, Ind. 289 b, 39-55.