Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/310

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de cause de mouvement sans mouvement, ni de mouvement sans mobile, la question se diviserait en deux : y a-t-il des choses en mouvement et, comme la cause de ce mouvement, une nature ? À la première partie de la question, Aristote répond en somme dans les chapitres 2 et 3 du premier livre de la Physique, et aussi dans tous les passages où il s’occupe des arguments de Zénon (VI, 2 et 9 ; VIII, 8). On sait qu’il réfute Zénon avec le plus grand soin au moyen de la distinction de l’infini en acte et de l’infini en puissance. Mais, au premier livre de la Physique, où il réfute aussi la doctrine éléatique de l’immobilité, il procède plus sommairement et il consacre plus de développement à l’examen de la doctrine de l’unité de l’être qu’à celle de l’immobilité. C’est que l’examen des thèses éléatiques ne lui paraît pas relever proprement de la physique. Tout en reconnaissant que l’étude de ces thèses a son intérêt[1] et qu’il peut arriver à leurs auteurs de soulever par accident des difficultés vraiment physiques, il estime que le physicien n’a pas à discuter longuement avec eux. Cela revient à dire que le physicien n’a pas à établir les principes de la physique. Pourtant on ne voit pas que, comme métaphysicien, Aristote se soit davantage préoccupé de les établir. La vérité est que l’existence d’êtres en mouvement lui paraît aller de soi. Il n’y a pas même besoin d’en apporter une démonstration indirecte en réfutant ceux qui le nient. Il existe des êtres en mouvement : l’induction, c’est-à-dire l’expérience, le prouve de la façon la plus manifeste (2, 185 a, 12-14). — Lorsque, au IIe livre de la Physique, Aristote arrive à la seconde partie de la question, à savoir l’existence de la nature sous le mouvement et les mobiles, il procède encore de la même façon. On n’a qu’à considérer ceux des êtres qui sont dits exister par nature, des animaux, des plantes, des corps simples : on constate de la manière la plus évidente que ces êtres présentent avec les autres une différence marquée qui est précisément de se

  1. Phys. I, 2, 185 a, 20 : ἔχει γὰρ φιλοσοφίαν ἡ σκέψις. Le mot φιλοσοφία a ici le sens de investigatio, tout à fait comme dans Pol. III, 12, 1282 b, 23 : cf. Bonitz, Ind. 820 b, 58.