Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/368

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mes portés à considérer les astres comme des points géométriques. C’est une erreur : ce sont des êtres animés qui ont une vie, ζωή, et même une activité pratique, πρᾶξις (De caelo II, 12, 292 a, 18), et tellement même qu’il faut les considérer comme des êtres beaucoup plus divins que l’homme (Éth. Nic. VI, 7, 1141 a, 34). Aussi le ciel, animé et doué comme tel d’un principe de mouvement, jouit-il éternellement de la vie la plus excellente et la mieux faite pour se suffire à elle-même[1]. Il n’est donc pas douteux qu’il y ait dans le monde sidéral pour informer l’éther, simple corps comme les autres éléments, des âmes et même des âmes très parfaites. — Toutefois, quand nous voulons aller au delà de ces indications générales, nous rencontrons chez Aristote un assez grand nombre d’obscurités et d’incertitudes. On sait que les astres, selon Aristote, sont attachés à des sphères, et que ces sphères sont corporelles[2]. Mais Aristote ne nous dit pas si l’âme appartient à l’astre ou à la sphère, ou si chacune des deux choses a une âme. Comme l’astre est fixé sur la sphère et que c’est celle-ci seule qui se meut, comme d’ailleurs Aristote dit positivement, nous venons de le voir, que le ciel est animé, il est hors de doute que la sphère a une âme. Peut-être l’astre n’en a-t-il pas d’autre et participe-t-il seulement à celle-là, comme l’œil par exemple participe à l’âme sensitive de l’homme. — Mais, cette première difficulté écartée, il s’en présente aussitôt une seconde qui est plus grave et dont l’examen nous fait passer de la question de la substance des êtres sidéraux à celle de leur mouvement. Le corps de l’astre et de la sphère est fait d’éther, et l’éther a une nature. Quels sont donc respectivement le rôle de la nature de l’éther et celui de chaque âme sidérale dans le mouvement d’une sphère ? Lorsqu’il s’agit d’un animal terrestre, son âme le meut autrement que ne feraient les natures de la terre, de l’eau et du feu : elle meut souvent contre ces

  1. De caelo II, 2, 285 a, 29 : … ὁ δ’ οὐρανὸς ἔμψυχος καὶ ἔχει κινήσεως ἀρχήν… I, 9, 279 a, 20 : … ἀναλλοίωτα καὶ ἀπαθῆ τὴν ἀρίστην ἔχοντα ζωὴν καὶ τὴν αὐταρκεστάτην διατελεῖ τὸν ἅπαντα αἰῶνα.
  2. Ibid. II, 12, 293 a, 7 : … ἑκάστη δὲ σφαῖρα σῶμά τι τυγχάνει ὄν.