Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/71

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tant pas pu être donné au grand public tel qu’il est, sans entrée en matière ni conclusion[1]. Enfin les négligences du style, les répétitions et, d’autre part, l’existence parfois d’une double rédaction, comme pour le livre II du Traité de l’âme, s’expliquent au mieux dans l’hypothèse d’une demi-publication. — Cette demi-publication est d’ailleurs la mesure exacte à laquelle il faut s’en tenir. D’une part en effet les écrits scientifiques, tels que nous les possédons, sont plus que des notes personnelles destinées à des leçons. D’abord ils sont trop soigneusement articulés, malgré leurs imperfections, pour n’être que cela. Ensuite le système de renvois dont nous avons parlé eût été sans utilité pour l’usage personnel de l’auteur. D’autre part, à moins que par impossible les cours d’Aristote aient été dictés, ce qui d’ailleurs nous ramènerait au même point, on ne peut admettre que les traités que nous lisons ne soient que des rédactions d’élèves : ils sont pour cela trop détaillés et surtout trop chargés de détails fins et subtils. Une seconde raison du reste plaide très fort contre cette hypothèse : c’est qu’Eudème et Théophraste, dans des lettres dont nous aurons l’occasion de parler (p. 70), s’entretiennent du texte de la Physique : il existait donc un texte arrêté et authentiquement aristotélicien de cet ouvrage[2]. Ainsi nous sommes ramenés à conclure que les écrits acroamatiques ont été, de la part d’Aristote, l’objet d’une demi-publication. Demi-publication pour les écrits scientifiques ; publication complète pour les écrits dialectiques et, par là, populaires, tel était en somme l’état des ouvrages d’Aristote à sa mort. Nous avons dit au reste que certains ouvrages scientifiques étaient incontestablement inachevés, tels la Métaphysique et la Politique. Peut-être même aucun ouvrage scientifique n’avait-il reçu la dernière main, puisque la demi-publication permettait un demi-achèvement et qu’elle laissait ainsi le champ toujours ouvert aux corrections.


  1. Zeller, p. 132.
  2. Zeller, p. 132-138.