Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/182

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velle de la mort de Mouzafer-Singue. Il voyait tout compromis et redoutait surtout le retour de ses troupes ; c’eût été une abdication, au moment où il fallait plus que jamais exercer sur l’Inde l’ascendant moral du génie européen. Depuis le départ de Bussy, des complications étaient survenues dans le Carnate. Méhémet-Ali n’avait pas encore rendu Trichinapaly, et il devenait évident qu’il voulait garder cette ville. Il intriguait en dessous avec les Anglais, tout en colorant de prétextes spécieux et de paroles mielleuses sa lenteur à exécuter le traité. Aussi Dupleix suivait-il avec anxiété les phases d’une révolution dont l’effet pouvait être de relever les affaires de Méhémet-Ali, si le nouveau soubab n’était pas dans nos mains. Il se désespérait d’être éloigné du théâtre des événements, de ne pouvoir rien sur leur marche, quand il apprit la transaction imaginée par Ragnoldas et acceptée par Bussy. Dans sa réponse, Dupleix approuva entièrement les actes de son lieutenant et n’eut que des éloges pour la prudence et l’habileté dont Bussy avait fait preuve en dénouant si rapidement une situation en apparence inextricable.

Le 18 février 1751, Bussy et Ragnoldas, ayant pris les mesures nécessaires, sûrs de tout, réunirent les troupes françaises et l’armée hindoue. Kerjean déclara solennellement que les ennemis de Salabet-Singue devenaient les ennemis de la France, que chacun eût donc à reconnaître ce prince pour soubab du Dékan et roi de Golconde ; puis se tournant vers Salabet-Singue, entouré de l’appareil royal, il l’assura de l’attachement de Dupleix, et lui présenta, au nom de celui-ci, le salami, l’offrande accoutumée de vingt et une pièces d’or.