Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/314

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faction des envieux, trop dépourvus eux-mêmes de mérites, pour ne pas chercher à obscurcir celui des autres… Faites-moi part, s’il vous plaît, de ce que vous aurez découvert des vues et des dispositions de Godeheu par rapport aux affaires du Dékan. Je roule toujours le projet de tout abandonner et de passer en France. J’attends vos réponses et vos avis. »

Le 3 août 1754 fut pour Dupleix le dernier jour de son autorité à Pondichéry, en qualité de commandant de la nation française. Godeheu se fit reconnaître des troupes comme gouverneur ; le soir, on lui porta les clefs de la forteresse, et il donna le mot d’ordre.

Le froid accueil du conseil avait humilié Godeheu ; il en rendait Dupleix responsable. La grande situation de ce dernier le gênait ; il le sentait plus maître que lui dans l’Inde. On commençait déjà à éprouver le vide causé par la disgrâce. « La confiance a peine à se rétablir à Pondichéry, disait Godeheu dans son journal le 10 août, par le bruit que le sieur Dupleix fait courir qu’il reviendra dans dix-huit mois. Tout le monde se tait, personne n’ose se livrer, et je sens mieux que jamais qu’un coup d’autorité aurait remédié à tout ; mais j’ai les mains liées, parce qu’il ne paraît se refuser à rien ouvertement, que je ne peux exiger de lui que ce qu’il veut faire paraître, et qu’enfin, s’il a des menées sourdes contre mes opérations, je ne puis l’en convaincre. Si le ministre avait été convaincu de l’embarras dans lequel l’ordre mitigé devait me jeter, je suis persuadé qu’il l’aurait laissé subsister tel qu’il était. C’était le moyen de découvrir tout et de me mettre en état d’agir avec fruit. » Ainsi il enrageait. Il lui fallait un coupable,