Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/40

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Avec sa connaissance du caractère hindou, Dupleix comprit que la première condition pour réussir, c’était de se présenter dans les négociations, non pas comme un marchand, mais comme un officier du Grand Mogol, en un mot comme l’égal de ces orgueilleux feudataires. Pour entrer dans le divan, Dupleix va donc se revêtir des insignes du pouvoir hindou, et par bonheur il n’a qu’à les ramasser dans les archives de la Compagnie. L’empereur de Delhi avait naguère octroyé le titre de nabab à l’intelligent Dumas, qui avait habilement posé des bases pour les interventions futures. Ce titre, que le paravana déclarait transmissible aux successeurs de Dumas, Dupleix le reprend avec toutes les prérogatives qui y sont attachées, et il affecte de s’en parer avec une ostentation et un luxe qui frappent l’esprit des indigènes, tout en excitant quelques railleries parmi les Français. Il se fait rendre à Pondichéry les honneurs qu’à Arcate on décernait au nabab, et pour en imposer davantage aux Hindous, pour se montrer dans tout l’appareil d’un prince asiatique, il entreprend un voyage au Bengale pour s’y faire reconnaître comme nabab de Chandernagor. Après les fêtes, qui furent magnifiques, Dupleix, dans l’espoir de flatter les mahométans, la race dominante, va à Hougli, entouré d’un nombreux et éblouissant cortège, faire visite au gouverneur musulman, qui, reconnaissant la supériorité de rang du nabab de Pondichéry, lui rend l’hommage du vassal. On fit une cérémonie pompeuse où rien ne fut épargné pour captiver l’imagination de ces peuples, qui ne croient à la puissance que lorsque celle-ci les éblouit par l’éclat de l’or et de l’acier. L’impression des Hindous fut pro-