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En un jour de folie étrange
Osa rêver votre beauté,
Fleurettes dont rien ne dérange
La sereine immobilité ?

Sa fantaisie aux doigts agiles
Enlumina vos fins émaux
Et sut implanter vos rameaux
Dans de merveilleuses argiles.

Loin par delà l’océan vert
Doit germer cette flore unique,
Aucun savant n’a découvert
Le secret de sa botanique.

Sur quelque rivage écarté
C’est un paradis, — ô merveille
Sans lendemain comme sans veille ! —
Fait de couleur et de clarté.

Cet éden fécond en mystères
A proscrit immuablement
De ses impassibles parterres
L’odeur, le bruit, le mouvement !

IV

 
Or, sur ces cadavres voltige
Comme un papillon cajoleur
Ta main qui va de fleur en fleur,
Et l’on voit sur sa roide tige

La fleur surprise se hausser
Puis s’épanouir, bien vivante !
Tout s’anime où va se poser
Ta caresse alerte et savante,

Tout se meut à tes doigts jolis :
Sous leurs délicates phalanges
Le bourgeon rejette ses langes,
La feuille défripe ses plis.

Les boutons mignards font des mines
En délaçant leur corset clair ;
Les amoureuses étamines
Épandent leur pollen dans l’air.