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Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/198

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LA PEUR

ment, j’ai poussé un cri. Alors ils sont entrés en même temps, et je les ai suppliés de sortir, parce qu’ils profanaient le repos ; je n’avais plus aussi peur, mais je pensais qu’ils marchaient sur Lui, et ça me faisait mal. Je leur ai parlé bien poliment, mais ils riaient, et ils me disaient encore des choses, des compliments ; j’ai recommencé à prendre peur, et un des deux m’a touchée : alors, j’ai crié de nouveau ; alors, ils m’ont enfoncé un foulard dans la bouche, et j’étouffais ; ils riaient toujours, et ils me serraient, avec leurs mains, partout le corps ; ensuite, pendant que l’un me tenait, l’autre a jeté un sou en l’air, comme pour jouer à pile ou face. J’ai entendu le sou tomber sur la pierre de mon pauvre mari, et l’un des deux hommes a poussé un juron, puis il s’est retiré dans l’allée, en me laissant seule avec l’autre. À ce moment-là, j’ai compris que j’étais l’enjeu, et je me suis débattue, mais le perdant est venu au secours de son camarade : à eux deux, ils m’ont tordu les reins pour me jeter sur le prie-dieu, et l’un m’a prise par les poignets, l’autre par les chevilles, et je ne sais plus, je ne veux plus savoir. J’ai entendu mon pauvre ami qui