Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/26

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2
LA PEUR

Les journaux de l’étranger, et plus particulièrement ceux des nations qui ne sont point sympathiques à l’Espagne, ne se firent, comme on peut croire, aucun scrupule d’accueillir les insinuations de notre compatriote ; mais, à leur grand désappointement, son premier article ne fut complété par aucun autre.

Le rédacteur avait-il compris à quel point ses accusations seraient importunes, au cours d’une guerre déjà difficile, et quel danger ce serait pour le pays de semer dans la flotte des ferments de défiance entre nos marins et leurs chefs ? Peut-être s’était-on ému, en haut lieu, de ce péril moral, plus grave encore que l’événement lui-même ? Il se peut que le gouvernement ait apprécié l’urgence d’arrêter les indiscrétions du journaliste, par des moyens que j’ignore. Peut-être aussi, deux familles puissantes, intéressées d’honneur à ce que rien ne fût ébruité, achetèrent le silence de la presse ? Quoi qu’il en soit des procédés mis en œuvre pour obtenir ce résultat, l’affaire n’eut pas de suites : les journaux étrangers supposèrent, j’imagine, qu’un polémiste de mauvais goût avait, mal à propos, échafaudé de romanesques hypothèses qu’il