Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/29

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
5
LE SETUBAL

gager sa mémoire d’une suspicion terrible, quelque scandale qui puisse en résulter pour d’autres.

Je raconterai donc ce que je sais, étant à même de corroborer mes dires, par témoins et par documents écrits. Voici les faits. On n’y relèvera qu’une inexactitude, volontaire, d’ailleurs, et relative aux noms des personnages et des lieux, car il m’a paru préférable, pour le moment du moins, de taire les uns et les autres.

Quatre années avant la guerre qui nous fut néfaste, mon frère Miguel, alors simple lieutenant à bord de l’Hippocampe, fit escale à Santiago, et le séjour dans cette rade se prolongea durant plusieurs mois. Personne ne songeait à s’en plaindre : la société prodiguait aux officiers le plus gracieux accueil, et l’existence s’écoulait en fêtes perpétuelles, données à terre, rendues à bord. Cette escadre, qui allait bientôt périr, semblait vouée aux dames et aux fleurs ; si j’en dois croire