Page:Hartex - Nora l'énigmatique, 1945.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
nora l’énigmatique

II

L’humeur d’Édouard était, en effet, d’autant moins compréhensible que le sort lui souriait.

Arrivé en Italie avec son régiment, encore simple soldat, il avait été soudain l’objet d’avancements rapides, tandis qu’il n’arrivait pas à décrocher un galon en Angleterre, pendant les longs mois de l’instruction militaire. À peine les délais réglementaires s’étaient-ils écoulés qu’il passait caporal, puis sergent.

Ce n’était pas tout. Attachée à la huitième Armée britannique, — qui poursuivait sa marche victorieuse depuis El Alamein, en passant par les colonies italiennes d’Afrique et la Tunisie, — l’unité d’Édouard avait participé aux durs combats du sud de l’Italie et suivait la glorieuse armée façonnée par Montgomery qui, après Tunis et le Cap Bon, avait traversé la Sicile, la Calabre, Naples. Les Canadiens s’étaient bien battus.

Surtout pour prendre le petit village de Gerardino, où se trouvent maintenant Édouard et ses compagnons, sur la route de Cassino et, plus loin, Rome.

Les Allemands, depuis l’armistice signé par le maréchal Badoglio, luttaient avec férocité, mais les nôtres y mettaient encore plus d’ardeur, convaincus de la grandeur de leur cause.

On le voyait bien, aux promotions et décorations qui pleuvaient. Un Canadien-Français, le major Paul Triquet, n’avait-il pas même obtenu la plus belle décoration militaire qui soit, c’est-à-dire la Croix de Victoria, cette Victoria Cross coulée dans le bronze des canons pris à Sébastopol, au cours de la vieille guerre de Crimée ?