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nora l’énigmatique

dévergondée, adonnée à tous ses caprices, étourdie, en somme une coquette de village, il apercevait maintenant une femme capable de réflexion, comme aussi d’attachement et de prévenance. La conversation n’était plus avec elle une sorte d’escrime cruelle, ou bien une suite de badinage sans signification. Elle comprenait les réalités et pouvait s’intéresser aux manifestations sérieuses de la vie.

Édouard Lanieu prit l’habitude de se raconter à elle. Il lui fit connaître son passé, sans omettre le drame qui avait assombri son enfance et son adolescence. Elle l’écoutait avec sympathie, l’interrogeait avec intelligence.

Certes, il y avait encore des orages, car cette nature ardente ne pouvait toujours se contenir. Au fond, se disait Édouard, ces moments très vifs mettent du piquant dans une liaison qui menace de sombrer dans la monotonie.

De la sorte, et en peu de jours, il s’était mis à l’aimer. Il ne se l’avouait pas : d’ailleurs, quand un homme d’action s’arrête-t-il à définir ses sentiments ? Mais cet amour finissait par emplir sa vie. D’autant plus que Nora paraissait y répondre parfaitement. Le sergent en oubliait qu’il fréquentait une suspecte.

On imagine, dès lors, le brutal réveil que constituait la révélation de Jacopo.

Le capitaine avait envoyé Édouard se reposer.

— Il faut recommencer l’enquête, avait-il dit. Nous possédons toutefois des données nouvelles. Mais il n’y a rien à faire, tant que je n’aurai pas repris l’interrogatoire de Jacopo ; surtout, tant que je n’aurai pas fait