Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/52

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il avait fait son hommage à la vie, elle avait levé la tête vers lui et elle avait vu, sur son front, le signe du génie. Instinctivement et tout de suite, elle avait deviné qu’il était quelqu’un. Marcel avait reconnu l’artiste. Ému, il se tut. Il avait écouté distraitement les boutades de son ami Félix. Le voyant taciturne, Jean lui dit : « Que fais-tu là ? Que signifie ce silence apocalyptique ? »

— La grande admiration est muette, dit Marcel sentencieusement.

Germaine, qui prêtait l’oreille, fut seule à comprendre le sens de ces paroles. Elle parut flattée. Le ton de la conversation s’éleva peu à peu. Faure, que le vin avait rendu hardi, profita d’un moment d’inattention de ses amis pour se glisser près de sa voisine. « Mademoiselle, dit-il, permettez-moi de vous faire part de l’estime que j’ai de votre talent. Vous ne me connaissez pas, et c’est peut-être incivil de vous adresser la parole ; mais vous me pardonnerez, si vous songez que c’est l’unique occasion qui me soit offerte d’entendre votre voix parler pour moi seul.

— Monsieur, le geste que vous venez de faire, je puis me vanter de l’avoir provoqué. Vous m’avez tellement…

— Amusé ?