Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/58

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foutue et pour la vie, parce qu’une fois traîné dans les journaux vous verrez que vos amis déballeront tout ce qu’ils savent sur votre compte. C’est toujours comme ça, mais ne vous faites pas trop de bile. On voit se promener dans le monde pas mal de gens qui ont leur réputation foutue, il y en a même dix fois autant que de ceux qui sont blancs comme neige. Tout ça, ce n’est que peu de chose.

Des pas retentirent dans le corridor, la serrure grinça, la porte de la cellule s’ouvrit, et un agent appela Chvéïk.

— Excusez, dit Chvéïk en grand seigneur, je suis ici depuis midi seulement, tandis que ce monsieur attend depuis six heures du matin. Je ne suis pas pressé, moi.

Une forte poigne tira Chvéïk dans le couloir et le poussa sans un mot au premier étage du bâtiment.

Au milieu d’une pièce se tenait assis derrière son bureau le commissaire de police, un monsieur corpulent, à l’apparence débonnaire, qui dit à Chvéïk :

— Alors c’est vous, Chvéïk ? Et qu’est-ce qui vous amène ici ?

— J’ai été amené ici par monsieur l’agent parce que je me suis plaint d’être mis à la porte de la Maison de fous sans manger. J’ai pris ça comme une injure, parce que, moi, je ne suis pas une fille des rues, une traînée quelconque.

— Écoutez, monsieur Chvéïk, dit le commissaire d’un ton complaisant, nous n’avons aucune raison de nous faire du mauvais sang avec vous, n’