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Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/135

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et si sage, s’était si fort vautrée dans le barbarisme et la fange, elle s’était tellement attaquée à toutes les personnes et à tous les devoirs, qu’il n’y eut pas une seule réclamation en France quand le premier consul écrasa du talon de sa botte cette hydre aux mille têtes renaissantes. » Un arrêté des consuls avait réduit à treize, comme nous l’avons dit ailleurs, le nombre des feuilles politiques.

C’est dans de telles circonstances que M. Bertin jeta les bases du Journal des Débats, et l’entreprise n’était certes pas facile. Comment, en effet, faire un journal sous un soldat tout-puissant qui ne voulait pas qu’on discutât les lois, qu’on expliquât les faits ? Comment attirer à soi l’intérêt et l’attention d’un peuple qui s’occupait de toutes ses gloires, et comment lui faire lire un journal, à ce peuple émerveillé qui pouvait lire chaque matin une proclamation dietée par Napoléon ?

Toutes ces difficultés, M. Bertin en triompha avec une rare intelligence. Napoléon avait commencé son œuvre de reconstruction politique et sociale. Avec le coup-d’œil qui ne l’a jamais trompé, M. Bertin comprit quelle pouvait être la fortune d’un journal qui, s’associant pour ainsi dire à la mission du premier consul, entreprendrait, dans la sphère des idées, le travail que ce puissant génie accomplissait dans la sphère des faits. Il se plaça donc à la tête du mouvement religieux et gouvernemental qui suivit le 18 brumaire. et c’est avec un vif intérêt que l’on suit les premiers pas du Journal des Débats dans cette carrière où il devait marcher avec tant de gloire et tant de succès.

Ce ne fut pourtant point par la politique proprement dite que le Journal des Débats acquit cette influence