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Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/166

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alors ! et quels athlètes ! Le retour des Bourbons avait partagé la France en deux camps bien tranchés : ceux qui voulaient conserver les libertés si chèrement acquises, et ceux qui voulaient effacer de notre histoire les ving-cinq dernières années. À peine était-on remis de la secousse qui avait failli engloutir la patrie, que les partis se trouvèrent en présence avec toutes les passions humaines, dans les chambres, dans les journaux. On ne s’attaqua d’abord que par des épigrammes ; mais bientôt la lutte prit de jour en jour un caractère plus prononcé d’âpreté, de colère, d’injure, et ce fut avec des vengeances que l’on se combattit.

« Cette mêlée d’opinions, d’antipathies, de dissertations, de sarcasmes, de haines, de provocations, d’invectives, qui passionnaient et scandalisaient les tribunes, se continuait au dehors dans les journaux, que la liberté donnée à la presse rendait plus nombreux et plus acharnés. Tous les talents littéraires du temps s’armaient pour leur cause d’une polémique incessante qui changeait en controverses tous les entretiens L’esprit public, comprimé si long-temps par les armes et le despotisme, jaillissait par mille voix. On sentait partout l’explosion d’un siècle nouveau dans les âmes. La France fermentait d’idées, d’ardeur, de zèle, de passions, que la Révolution, l’Empire, la Restauration, plaçaient face à face, et à qui l’élection, la tribune, le journalisme, ouvraient l’arène pour se combattre ou se concilier. Chacun des camps de l’opinion avait ses écrivains soldés de popularité ou de faveur, selon la cause à laquelle ils se vouaient[1]. »

Une certaine liberté, nous l’avons dit, avait d’abord été laissée à la presse par le gouvernement de

  1. Lamartine.