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Dom Grognon, ou le Cochon de saint Antoine, etc., etc. »

Qui ne connaît le Père Duchesne, dont le nom est devenu proverbial, et ses grandes joies et ses grandes colères, et ses bons avis, et ses grandes motions ? C’était là un homme qui s’entendait à remuer la fibre populaire ! Aussi son succès fut-il immense : en quelques mois le vieux marchand de fourneaux avait débité un million de ses sermons bougr… patriotiques, à deux sous, et réalisé plus de 50 000 liv. de bénéfices[1]. Nous parlons du Véritable Père Duchesne, de celui qui portait cette singulière épigraphe : Memento mori ; de celui d’Hébert enfin. Les Père Duchesne, en effet, ont été si nombreux pendant la révolution, qu’il est facile de les confondre.

Hébert avait été précédé dans la carrière par Lemaire, qui, dès 1790, avait commencé la publication de ses Lettres b… patriotiques, auxquelles il avait donné pour épigraphe ce distique : Castigat bibendo mores. Lemaire publia encore, de 1792 à 1793, la Trompette du Père Duchesne, dont le rédacteur se reconnaît suffisamment à l’épigraphe : In vino veritas.

  1. Dans un post-scriptum intitulé : Encore une petite bouffée de ma pipe à Poincinet-Camille, Hébert répond à des accusations dont ce succès avait fourni le prétexte à Camille Desmoulins. — « Camille, dit-il, me fait un crime d’avoir débité mes feuilles à deux sous la pièce pour les armées, tandis qu’il a vendu, lui, plus de cent mille exemplaires de son Vieux Cordelier à 20 sous le numéro. Il prétend que je suis riche comme un Crésus, parce que depuis le mois de juin j’en ai débité neuf cent mille, ce qui fait 90 000 livres… Au surplus, j’ai placé mon bénéficc dans l’emprunt volontaire. »