Messieurs, je vous demande excuse
Et je croyais avecque vous
Trouver mon fainéant d’époux,
Qui tous les jours ici s’amuse
Et fait le nouvelliste au milieu de vingt fous.
Elle s’en plaint à tous ceux qu’elle rencontre : il a perdu le sens, il n’est plus propre à rien :
Quand chez un procureur il va pour ses affaires,
Il oublie en causant ce qui l’y fait aller ;
Pourvu qu’il nouvellise, il n’y songe plus guères,
Et s’en revient sans en parler.
Dernièrement, tout prêt à rendre l’âme,
Il pensa me faire enrager,
Et, d’un air tout mourant, il me disait : Ma femme,
N’as-tu rien de nouveau ? Si tu veux m’obliger,
Va t’en chercher, je te conjure,
Quelque nouvelle qui soit sûre.
À son apothicaire il en disait autant,
À son médecin tout de même :
Ils avaient beau le voir avec un soin extrême,
Sans nouvelles jamais il n’en était content ;
S’ils n’en apportaient pas, il leur faisait la mine,
Et nous étions obligés quelquefois
D’en inventer entre nous trois
Pour l’engager à prendre médecine.
Il n’en dort pas, ou, s’il cède au sommeil, c’est pour rêver de ce qui l’occupe exclusivement :
Il ne songe jamais si ce n’est de nouvelles,
Et, quand il croit en avoir de fort belles,
Il me tire en rêvant, la nuit, pour m’en conter ;
Quand il n’a rien à faire, il lève quelque armée,
Qu’il casse quelques jours après ;
Et quelquefois il croit voir l’Europe alarmée