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Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 2.djvu/129

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sures, parce qu’il est plus aisé, plus court, de s’en tirer par une épigramme ou par des injures, sont, au demeurant, les meilleures gens du monde. Nous pouvons bien répondre au moins de ceux que nous sommes à portée de connaître : ne craignez point que ces gens-là aillent et viennent pour vous déchirer sourdement, ni qu’ils trament rien contre vous, soit pour vous fermer l’accès des grâces, soit pour vous noircir dans l’esprit de ceux qui vous pourraient être utiles ; ils n’en veulent qu’aux mauvais écrivains. Ceux principalement qui ont le courage de se détacher des emplois ou des dignités littéraires, qu’on n’obtient si souvent qu’à force d’intrigue, de souplesse, de basses manœuvres, sont incapables du moindre manége ; c’est l’affaire de ces hommes doux, froids, tranquilles et maîtres d’eux-mêmes, qui, toujours complaisants, flatteurs, amis de tout le monde, mais sans aimer personne, et faux par principes ou par complexion, s’emparent des sociétés, y dominent, et tournent à leur gré les esprits. Quelques-uns même de nos critiques sont de très-bon commerce, et l’on pourrait leur reprocher plusieurs excès d’indulgence. Si leur censure n’épargne point les coryphées de la littérature, c’est que toutes les fautes sont contagieuses, que tout tire à conséquence de leur part, et qu’enfin, s’il faut respecter Platon, la vérité doit être encore plus chère.

Ajoutons enfin que l’exemplaire de l’Affiche de Province appartenant à la Bibliothèque impériale contient de nombreux cartons, notes manuscrites et lettres autographes, qui offrent un intérêt facile à comprendre. On y trouve de curieuses révélations sur les susceptibilités, parfois bien étranges, de la censure, et aussi sur les démêlés que les rédacteurs avaient avec des imprimeurs timorés : celui de Querlon, notamment, poussait la prudence jusqu’à la peur et au ridicule.