Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 3.djvu/18

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Ce n’est pas un petit embarras pour un écrivain, dit-il dans sa préface, que de prévenir le public en sa faveur, et de donner un tour assez insinuant à ses promesses pour faire souhaiter qu’il les remplisse… Ceux qui ont quelque connaissance de l’histoire littéraire de Paris, de Londres et de quelques villes de Hollande, où les sciences sont en honneur, n’ignorent pas que tout ce qu’on appelle aujourd’hui projets d’ouvrages, préfaces, avertissements, introductions, sont autant de stratagèmes que les auteurs emploient à l’envi pour se supplanter les uns les autres et pour surprendre l’estime du public…

Je me flatte que le seul titre de cette feuille périodique, et la simple exposition de ce qui doit en faire la matière, suffira pour lui servir de recommandation, surtout en France, où, depuis la malheureuse chute du N… du P… (Nouvelliste du Parnasse), on est encore à lui voir naître un successeur qui ait la hardiesse de remonter sur Pégase, et l’espérance de se tenir un peu plus ferme sur le dos de ce cheval indocile.


Je suis ce téméraire, ou plutôt ce vaillant.


Instruit par l’infortune du N…, j’en ai tiré deux fruits qui me font espérer quelque succès pour mon entreprise, et dont l’explication fera connaître au public ce qu’il doit attendre de moi :

1o Quoique les Français soient une nation libre, et que, sous l’administration présente, qui est pleine de douceur et de modération, ils jouissent de bien des avantages, j’ai compris, par ce qui est arrivé au N… du P… que cette liberté a encore des bornes. En m’efforçant là-dessus de les distinguer, pour m’y contenir avec soin, j’ai reconnu non-seulement que ces bornes sont justes, mais encore que tout ce qui est au-delà, loin de mériter le nom de liberté, n’en est qu’une fausse image, ou plutôt une véritable corruption. Je m’expliquerai par des exemples qui appartiennent à mon sujet. Il est permis en France de critiquer les ouvrages d’esprit, pourvu qu’on le fasse avec certaines mesures d’honnêteté, et sans toucher aux défauts personnels. Il est permis de raisonner, sur les affairés politiques, pourvu qu’on n’en prenne