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rieux, comme il s’en convaincra aisément à l’ouverture du premier dictionnaire. »

Le magistrat avait trouvé l’article bien ; mais le supérieur des comédiens a jugé que ce n’était pas suffisant, que c’était à l’offensé à dicter les termes de la réparation ; ce à quoi le journaliste n’a pas voulu acquiescer. Interea patitur justus, et les feuilles sont suspendues.

Le sieur Panckoucke intrigue beaucoup pour faire supprimer l’Année littéraire, et l’annexer à son Mercure. Tout le parti des encyclopédistes le seconde, et il est bien à craindre que cela ne tourne mal pour le pauvre Fréron.


Nous avons dit comment se termina cette persécution. Après plusieurs mois d’interruption, l’Année littéraire obtint la permission de reparaître, mais le privilége en fut ôté au fils de Fréron.

La Correspondance secrète parle aussi, nécessairement, de la querelle de « ce gros histrion avec le petit Fréron », et elle ajoute quelques particularités bonnes à noter :


L’Année littéraire est suspendue depuis trois semaines. Grande guerre entre les philosophes et leurs adversaires. Ceux-ci intercèdent vivement pour le jeune Fréron ; mais le parti philosophique sera vraisemblablement le plus fort. On a fait venir la veuve Fréron chez le lieutenant de police, à une audience secrète où se sont trouvés l’abbé Arnaud et M. Suard, tous deux académiciens et députés de la philosophie. On lui a déclaré que, tant que Linguet avait eu le champ libre, on avait été obligé de tolérer les sorties fréroniques contre les grands hommes du jour, parce qu’il y aurait eu de l’inconséquence à permettre le plus et à proscrire le moins ; mais qu’à présent que les circonstances ont changé, il faut que les héros de l’Encyclopédie jouissent enfin paisiblement de leur gloire. On lui a donc proposé de rétablir ses