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Qui donc avait pu les charger, comme malgré eux, d’une mission qui leur imposait une réserve si étrangère à leurs habitudes ? Il semblerait presque, à les entendre, que c’était une mission officielle, et l’insinuation relative aux édits et arrêts, dont le privilége leur est concédé, tendrait à confirmer cette supposition. Mais nous en sommes réduits là-dessus à de simples conjectures, les contemporains ne nous ayant point donné la clef de cette énigme, — si tant est qu’il y ait une énigme. Voici comment en parlent les Mémoires secrets :

« On répand le prospectus d’un Journal français par MM. Palissot et Clément, qui, à les en croire, s’en sont trouvés chargés au moment où ils y pensaient le moins. Ce qui n’est pas plus aisé à persuader, c’est que la décence et l’impartialité en seront la base. Ils ne prennent point la plume pour critiquer, mais, au contraire, pour venger les auteurs qui auront à se plaindre ; nouveaux Ajax, ils offrent leur bouclier à qui voudra s’en couvrir[1]. La

  1. J’ai rencontré à la bibliothèque Sainte-Geneviève, dans un recueil factice, quelques numéros d’un Flibustier littéraire qui s’annonçait également comme le champion des victimes du journalisme : « La tyrannie que deux auteurs exercent dans la république des lettres me paraît si outrageante, que je me crois obligé, en qualité de mauvais écrivain, de prendre le parti de mes confrères. J’ai résolu d’examiner la critique que l’on fait de leurs ouvrages, et de les dispenser par ce moyen du tribut servile que la plupart d’entre eux payent pour obtenir le passeport de leurs livres. » Une inscription manuscrite attribue cet ouvrage hypercritiqué, publié à Londres en 1751, à de Sainte-Aulair.

    En 1758, Dreux du Radier publia le projet d’un Censeur impartial, qui devait avoir aussi pour objet la défense des auteurs injustement attaqués dans les autres ouvrages périodiques.