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néanmoins très français, est noté comme manquant de goût et de mesure. Ainsi que procédait l’auteur de Notre-Dame de Paris, Rostand a marqué en Cyrano l’antithèse de la laideur physique et de la beauté morale, et comme fit l’auteur des Châtiments, il a célébré Napoléon, empruntant même à Hugo le titre de l’Aiglon. Son vers est celui que réclame Victor Hugo dans la Préface de Cromwell, avec plus de dégingandement et de désarticulation, et de contorsions acrobatiques. Où le versificateur va beaucoup plus loin que le maître, c’est quand il supprime la césure pour l’œil après la sixième syllabe de l’alexandrin et qu’alors un mot chevauche sur les deux hémistiches :

Ah ! ma chère, ces tailles courtes sont infâmes !…
Ça ne vaut pas la Marseillaise, nom d’un chien !…
Vous qui serez les éternels Samaritains…
La colère de l’Empereur sera sans bornes…


ou admet pour sixième syllabe une muette :

Mon fils est né prince français, qu’il s’en souvienne !…
Rappelez-vous toutes les fausses prophéties…


Hugo ne fit jamais ainsi.

Quoi qu’il en soit, c’est avec raison que M. Rostand le célébra solennellement par un poème, lors du centenaire, et que dans ce poème — où telle page semble presque de la main du dieu — il lui adresse cette prière :

… Maître, Génie, Hugo,
Souris, Père d’un siècle, aux humbles fils d’une heure !
Donne-nous le courage et donne-nous la foi
Qu’il nous faut pour oser travailler après toi…