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INTRODUCTION

les plus sages et les plus honnêtes de sa Florence, Dante se plaît à reconnaitre les descendants directs de la race sacrée des Romains. On sait de reste quelle admiration, quelle piété vraiment filiale le poète avait vouées à Virgile ; mais la « longue étude » qu’il avait faite de l’Enéide, avec toutes les réminiscences qui en sont le fruit, est loin de résumer la préparation classique de ce théologien : à Virgile il associe dans son amour Homère, Horace, Ovide, Lucain, Stace, d’autres encore, qu’il a certainement connus et vénérés. Peu importe qu’il ne les ait pas toujours bien compris ; l’essentiel est qu’ils furent pour lui des guides, des maîtres, des modèles incontestés.

L’Italie du Moyen Age n’a donc jamais complètement cessé de rester en contact avec les anciens, et de leur rendre une sorte de culte, fût-ce avec une intelligence imparfaite. C’est à l’abri de l’antiquité que le génie italien, épris de réalité, d’harmonie et de beauté, s’est tenu en garde contre les abstractions, les subtilités et le formalisme de la pensée scolastique, au moment même où la vie municipale émancipait la commune, et appelait ce peuple au libre épanouissement de ses facultés ; c’est à cette école que Dante a développé les dons de sa race, et su produire, en dépit de sa théologie, de sa science encyclopédique et de sa conception symbolique de la poésie, une œuvre personnelle, humaine, si voisine de nous par certains aspects que parfois on a cru y reconnaitre l’aurore de la Renaissance.

La Divine Comédie n’appartient pourtant pas encore à la Renaissance ; elle est au contraire le poème du Moyen Age italien par excellence. Car s’il arrive que la pensée de Dante nous semble très moderne, la forme qu’elle revêt, l’expression que le poète donne à ses idées religieuses, politiques, philosophiques ou même poétiques