Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/109

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placer par un habit moderne, par une cravate de satin, le manteau et le rabat de notre aïeul… Je n’estime pas qu’il ait gagné au change.

— En y regardant d’un peu plus près, dit Holgrave laissant percer une vive surprise sous l’éclat de rire que lui arrachait cette remarque naïve, vous auriez constaté d’autres différences. Je puis vous assurer que vous avez eu sous les yeux une figure contemporaine, une figure que vous rencontrerez très-probablement quelque jour… Maintenant, ce qu’il y a de remarquable, c’est que pour le monde en général, et même pour ses amis les plus intimes, l’original a une physionomie agréable, exprimant la bienveillance, l’ouverture de cœur, une humeur sereine et joyeuse ; bref, une foule de qualités analogues, toutes excellentes. Le soleil, vous le voyez, parle un tout autre langage, et je n’ai pu l’en faire changer, malgré une demi-douzaine de tentatives patiemment renouvelées… Nous avons ici l’homme lui-même, subtil et secret, impénétrable et rusé, dur, tyrannique et froid comme la glace… Regardez cet œil !… voudriez-vous être à sa merci ? Et cette bouche ! est-elle faite pour le sourire ?… L’original sourit, cependant, et avec quelle bénignité !… Tout cela est d’autant plus dommage qu’il s’agit d’un dignitaire assez éminent, et que cette effigie est destinée au burin des graveurs.

— À la bonne heure, mais j’en ai assez, remarqua Phœbé détournant les yeux… Ce portrait-ci ressemble beaucoup à notre ancienne toile. Ma cousine, cependant, en possède un autre, une miniature vraiment séduisante. Si l’original est encore au monde, je défierais bien le soleil de lui donner une expression austère et dure.