Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/16

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saient pressentir une mort violente ; sur le cou du défunt des traces de doigts ; — sur sa manchette empesée l’empreinte d’une main sanglante ; — sa barbe pointue était éparse comme si elle eût été saisie et violemment tirée. On affirma de plus qu’auprès du fauteuil du colonel la fenêtre était ouverte, et que, peu de minutes avant le fatal événement, on avait vu, derrière la maison, grimper un inconnu par-dessus la muraille du jardin. Mais il serait absurde d’attacher beaucoup d’importance à de pareils récits, reproduits fatalement après tout incident du même genre, et destinés dans certains cas à se perpétuer d’une manière étrange, pareils à ces variétés du genre fungus qui marquent durant des années et des années, la place où un arbre abattu par le vent, s’est peu à peu réduit en poussière. Pour nous, autant aimerions-nous croire à ces fables qu’à celle de cette « main de squelette » que le Lieutenant-Gouverneur avait vue, disait-on, serrer le gosier du colonel, mais qui s’évanouit tout à coup, lorsque le magistrat eut fait quelques pas dans la chambre. Ce qui est plus certain, c’est que sur le corps du défunt, les médecins se consultèrent longtemps et se querellèrent à outrance. L’un d’eux, — qui, paraît-il, était un homme de talent, — soutint, si nous avons bien compris sa rédaction hérissée de mots savants, que c’était là une bonne et belle attaque d’apoplexie.

Chacun de ses confrères adopta quelque autre hypothèse plus ou moins plausible. Toutes étaient enveloppées de formules mystérieuses dont nous devons penser que les érudits ne s’effarouchaient pas, mais qui n’en jettent pas moins le lecteur moderne dans des