Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/21

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certains membres de sa postérité, aussi distinctement que si le colonel lui-même, tant soit peu diminué, — tant soit peu délayé pour ainsi dire, — eût reçu le don d’une immortalité intermittente. À deux ou trois époques différentes, alors que les chances de la famille semblaient au plus bas, on avait vu paraître ce représentant des qualités héréditaires, et on avait entendu, parmi les compères et les commères de la cité, — dépositaires nés des traditions municipales, — circuler ces murmures significatifs : « Voilà le vieux Pyncheon qui revient ! On va remettre à neuf la charpente des Sept-Pignons ! » De père en fils, effectivement, ils s’attachaient avec une singulière ténacité à la demeure de leurs ancêtres. Quelques raisons, cependant, — ou pour mieux dire quelques impressions trop légèrement fondées pour qu’il les consigne ici, — font penser à l’auteur de ce récit que parmi les propriétaires successifs du domaine en question, un assez grand nombre, si ce n’est la plupart, furent assiégés de scrupules, quant au droit moral qu’ils avaient de le retenir. Légalement parlant, aucun doute ne pouvait être soulevé ; mais le vieux Matthew Maule, — on a tout lieu de le craindre, — voyagea longtemps après sa mort, posant à chaque pas sur la conscience d’un Pyncheon un pied qui n’avait jamais passé pour léger. S’il en est ainsi, nous avons à résoudre une question grave ; celle de savoir si chacun des héritiers du domaine, ayant conscience du tort commis et manquant à le réparer, ne commettait pas à nouveau le crime de son ancêtre et n’en devenait pas responsable à son tour.

En admettant que cela soit, au lieu de dire que les Pyncheon héritaient d’une grande fortune, ne fau-