En remontant à l’origine de ces bruits populaires on arrivait, — circonstance fort essentielle, — à certaines paroles, à certaines obscures insinuations qu’aurait laissé tomber, de temps à autre, le fils du sorcier mis à mort, le père du Matthew Maule aujourd’hui vivant. Et ici, M. Pyncheon pouvait invoquer un de ses souvenirs personnels. Bien que tout enfant à cette époque, il se rappelait, — ou s’imaginait, — que le père de Matthew avait eu quelque travail à faire, — soit la veille, soit le jour même du décès du Colonel, — dans ce même cabinet où le charpentier et lui s’entretenaient présentement… Or, des papiers d’affaires, appartenant au colonel Pyncheon (son petit-fils avait ce détail très-présent à la mémoire), se trouvaient alors étalés sur la table.
Matthew Maule ne feignit pas de se méprendre sur le soupçon qui lui était insinué de la sorte :
« Mon père, dit-il, — et toujours avec ce noir sourire qui faisait de sa physionomie une véritable énigme, — mon père était un plus honnête homme que le vieux Colonel aux mains sanglantes… Eût-il pu rentrer ainsi dans ses biens, il ne se serait pas permis de dérober un seul de ces papiers !
— Je n’entends pas faire assaut avec vous, lui répondit avec un calme hautain ce Pyncheon façonné aux manières de l’étranger ; et il ne me convient pas davantage de me montrer sensible aux mauvais propos dirigés, ou contre mon grand-père, ou contre moi-même. Un gentleman, avant d’entrer en rapport avec une personne de votre rang et de votre éducation, doit se demander, au préalable, si l’importance du but com-