Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/239

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C’est un héritage acheté trop cher, et trop aggravé par la malédiction qui pèse sur lui, pour être sitôt retiré à la postérité du Colonel ! »

M. Pyncheon voulut répondre, mais, — soit crainte ou colère, — il ne put faire entendre qu’une sorte de murmure comprimé dans le fond de sa gorge. Le charpentier se prit alors à sourire : — « Ah ! ah ! très-honorable monsieur, disait-il avec l’accent du sarcasme, vous avez donc à boire le sang du vieux Maule !

— Démon à visage humain ! Pourquoi garderais-tu ton empire sur mon enfant ? s’écria M. Pyncheon, lorsque son gosier débarrassé lui permit de parler… Rends-moi ma fille !… Tu t’en iras ensuite, et puissions-nous ne nous rencontrer jamais !

— Votre fille ! dit Matthew Maille, elle est à moi, maintenant !… Cependant, pour ne pas me montrer trop dur envers la belle mistress Alice, je la laisserai sous votre garde, mais sans vous promettre qu’elle n’aura jamais occasion de se rappeler le charpentier Maule. »

De ses mains, en même temps, il exécutait une passe de bas en haut ; et après que le geste eut été renouvelé un certain nombre de fois, la belle Alice Pyncheon s’éveilla de sa bizarre extase. Elle s’éveilla sans garder le plus léger souvenir de l’épreuve subie, et comme quelqu’un qui reprend, après un instant de rêverie, pleine conscience de la vie réelle. En reconnaissant Matthew Maule, sa physionomie redevint un peu froide, bien que douce encore, — et cela probablement parce que certain sourire tout spécial, qu’elle retrouvait sur le visage du charpentier, froissait son orgueil de jeune fille. Ainsi se trouva provisoirement