Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/305

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nesse elle-même !… Pas plus tard que ce matin, j’étais encore un vieillard ; je me souviens qu’en me regardant au miroir, je m’étonnais de me voir tant de cheveux blancs, et sur mon front tant de rides entre-croisées, et sur mes joues des sillons si creux, et autour de mes tempes un tel piétinement de pattes d’oie !… Tout cela était prématuré… Je ne pouvais pas m’y faire. La vieillesse n’avait sur moi aucun droit, puisque au fait et au prendre je n’avais pas vécu… Mais à présent, dites-moi, est-ce que j’ai l’air vieux ?… Si cela est, mon extérieur me trahit étrangement ; en effet, — débarrassé d’un grand poids que j’avais sur le cœur, — je me sens aux plus beaux jours de ma jeunesse, rempli d’espérance, et appelé à d’heureux destins.

— Puissiez-vous n’être pas déçu, dit le vieux gentleman, qui, un peu embarrassé, semblait vouloir se soustraire à l’attention éveillée, de tous côtés, par les propos insensés de son interlocuteur… Acceptez à cet égard mes vœux les plus sincères.

— Pour l’amour du ciel, cher Clifford, tenez-vous tranquille ! murmura sa sœur à l’oreille de ce dernier… Ils vont bien certainement vous croire fou.

— Vous même, Hepzibah, tenez-vous tranquille ! lui répliqua-t-il aussitôt. Que m’importe ce qu’ils pensent ?… Je ne suis certainement pas fou… Pour la première fois depuis trente ans, mes pensées débordent et trouvent immédiatement leur expression… J’ai besoin de parler, je parlerai ! »

Se tournant alors du côté du vieux gentleman, il reprit aussitôt la conversation.

« Oui, mon cher monsieur, disait-il, je crois et j’espère, du fond du cœur, que tous ces grands mots de