Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/5

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y élever sa chaumière au toit touffu, bien qu’il fût un peu éloigné de ce qu’on pouvait appeler à cette époque, le centre du village. Après un laps de trente ou quarante ans, la ville croissant toujours, le site occupé par cette espèce de hutte, excita la convoitise d’un éminent et puissant personnage qui, en vertu d’une concession décrété par la législature de l’État, revendiquait la propriété, non-seulement du morceau de terre occupé par Matthew Maule, mais d’une grande étendue de terrain située tout à l’entour. Ce prétendant, le colonel Pyncheon, était, d’après tout ce qu’on sait de lui, doué d’une volonté de fer. Matthew Maule, en revanche, s’entêta, malgré son obscurité, à défendre ce qu’il regardait comme son droit ; et pendant plusieurs années il réussit à garantir de l’invasion ce lambeau de terre (un are ou deux) qu’il avait détaché de la forêt-vierge, pour en faire l’emplacement de sa demeure et de son jardin. Sur ce procès il ne reste aucun document écrit. Tout ce qu’on en sait est de tradition. Il serait donc téméraire, peut-être injuste, de se prononcer définitivement sur les droits respectifs des parties. Tout au plus pouvons-nous légitimement soupçonner que le colonel Pyncheon étendait quelque peu au delà de ses véritables limites, la concession qu’il avait obtenue, afin d’y comprendre la modeste propriété de Matthew Maule. Ce qui semblerait le prouver, c’est que, malgré l’inégalité sociale des deux antagonistes, et bien qu’ils vécussent à une époque où l’influence personnelle était bien autrement puissante que nous ne la voyons maintenant, le litige dura plusieurs années et ne fut terminé que par la mort de l’une des deux parties, celle qui occupait le sol dis-