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Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/52

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ayez vécu… Elle achève une époque, elle en commence une autre. Jusqu’à présent assise au milieu du cercle que votre naissance aristocratique avait tracé autour de vous, le sang de vos veines se glaçait peu à peu pendant que le reste du monde poursuivait sa lutte ardente avec les nécessités diverses qui servent de mobile à l’activité humaine… Dorénavant vous allez poursuivre un but précis par un effort naturel et sain ; vous allez prêter votre force, — grande ou petite — à ce combat pour lequel se concentrent toutes les énergies de l’espèce humaine… Ceci seul est une victoire, — et la plus vraie que l’on puisse remporter ici-bas.

— Il est assez naturel, monsieur Holgrave, que vous ayez des idées pareilles, répliqua Hepzibah redressant sa longue taille avec une dignité tant soit peu froissée… Vous êtes un homme, — un jeune homme, — élevé, à ce que je puis croire, comme tout le monde l’est aujourd’hui, en vue d’une fortune à gagner… Mais ma naissance avait fait de moi une lady et j’avais toujours vécu comme telle… Oui certes, si gênée que fût ma position j’ai toujours été une lady !

— À la bonne heure, mais je ne suis pas moi, un gentleman de naissance… et je n’ai jamais vécu en gentleman, dit Holgrave se laissant aller à sourire. Ne soyez donc pas étonnée, ma chère dame, si je manque de sympathie pour des susceptibilités de ce genre… Ou je me trompe, cependant, ou je puis parvenir à m’en faire quelqu’idée… Ces titres de gentleman ou de lady ont eu leur sens, dans l’histoire du Passé ; ils conféraient des privilèges, plus ou moins dignes d’être ambitionnés, à ceux qui avaient le droit de les porter. Dans l’état présent de la Société, mais surtout dans