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CONTES ÉTRANGES

son paletot-sac en drap pilote, son capuchon rabattu sur ses oreilles et les mains protégées par de gros gants fourrés. M. Lindsey était un homme entre les deux âges, dont le franc regard animait une bonne figure gercée par le hâle et violacée par le froid, mais où l’on pouvait lire le contentement qu’il éprouvait de rentrer à son foyer, après une longue journée de travail. Ses yeux brillèrent de satisfaction lorsqu’il aperçut sa femme et ses deux enfants, bien qu’il eût peine à s’expliquer tout d’abord pourquoi sa petite famille était en plein air par un froid si rigoureux, surtout après le coucher du soleil. Presque aussitôt il vit la blanche petite étrangère courant çà et là dans le jardin et folâtrant sur la neige, pendant que les oiseaux la poursuivaient de leurs cris joyeux.

— Quelle est donc cette fillette ? demanda l’excellent homme ; sa mère est folle assurément de la laisser courir aussi peu vêtue par un temps pareil.

— Mon cher mari, répondit madame Lindsey, je n’en sais pas plus que vous sur son compte. C’est sans doute une enfant du voisinage. Violette et Pivoine, ajouta-t-elle en riant d’être l’écho d’une histoire aussi invraisemblable, veulent absolument que ce soit une figure de neige qu’ils se sont amusés à faire cette après-midi.

En disant ces mots, la jeune mère jeta les yeux vers l’endroit où se trouvait la susdite figurine ; mais quelle fut sa stupéfaction de ne plus apercevoir la moindre trace de ce laborieux ouvrage ! Plus de statue, pas même un tas de neige à la place, rien que l’empreinte de petits pieds tout alentour.

— C’est étrange ! murmura-t-elle interdite.