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LA MARQUE DE NAISSANCE

temps de former un désir qu’il était accompli, et les apparitions qu’elle avait mentalement évoquées flottaient vaguement indécises devant ses yeux ravis et confondus. C’étaient des scènes de la vie réelle, tableaux vivants et fantastiques, qui naissaient et s’évanouissaient avec la pensée qui les avait créés.

Lorsque Georgina eut épuisé sa curiosité sur cette innocente fantasmagorie, Aylimer plaça devant elle un vase du Japon rempli de terre végétale, du moins à ce qu’il lui parut. Bientôt elle ne put retenir un geste de surprise en voyant apparaître le germe d’une plante, qui s’ouvrit pour laisser croître un faible pédoncule dont les feuilles se déployèrent graduellement, comme mues par un ressort caché, pour découvrir une fleur ravissante.

— C’est magnifique, murmura la jeune femme, mais je n’ose toucher à cette fleur miraculeuse.

— Cueillez-la sans crainte et respirez-en le parfum passager pendant qu’il en est temps encore, car, dans peu d’instants, elle va périr et ne laissera dans le vase qu’un peu de poussière et de graines d’où naîtront des fleurs éphémères comme elle.

En effet, à peine Georgina eut-elle touché la fleur qu’elle se flétrit. Ses feuilles se replièrent et noircirent comme si elles avaient été exposées à l’action d’une violente chaleur.

— Le stimulant était trop fort, dit Aylimer.

Pour effacer l’impression causée par l’avortement de cette expérience, il proposa à la jeune femme de faire son portrait au moyen d’un procédé chimique de sa propre invention, qui consistait à soumettre une plaque de métal parfaitement polie, à l’action des rayons solaires. Georgina se