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LA STATUE DE BOIS

dont il s’entourait. Il sortait souvent, des journées entières quelquefois ; et aux rayons lumineux qui s’échappaient de ses fenêtres, on pouvait juger qu’il travaillait jusqu’à une heure avancée de la nuit, bien que personne n’eût été admis dans l’atelier durant ces séances de travail nocturne.

On ne remarquait pourtant rien d’insolite dans l’atelier aux heures où il était ouvert au public, seulement un gros bloc de chêne que Drowne conservait pour une œuvre d’importance à moitié dégrossi déjà, semblait prendre une forme quelconque, sans que l’on pût préciser encore quelle devait être cette forme.

C’était là un problème que les amis du sculpteur s’efforçaient de résoudre et sur lequel Drowne restait impénétrable. On ne le voyait jamais y travailler, et cependant la figure sortait peu à peu du bloc grossier et il devint bientôt évident que ce serait une figure de femme. À chaque visite nouvelle, les curieux remarquaient un plus grand amas de copeaux, et du bloc de chêne s’élançait une forme déjà svelte et gracieuse. On eût dit qu’une hamadryade s’était retirée au cœur de l’arbre, et qu’en abattant la rude écorce qui l’enveloppait l’artiste allait faire surgir une divinité charmante. Tout imparfaits que fussent encore l’attitude et surtout les traits de la statue, il y avait déjà quelque chose en elle qui forçait les regards à quitter les autres productions de l’artiste pour se reporter sur cette œuvre mystérieusement attrayante.

Le peintre Copley, depuis célèbre, mais encore peu connu, vint un jour visiter Drowne, à l’habileté duquel il rendait justice, bien qu’il n’ignorât pas ce qui lui manquait