d’autre part pour être un véritable artiste. En entrant dans l’atelier, il embrassa du regard toutes ces figures immobiles de rois, d’animaux, de femmes dont il était encombré. On eût pu faire de la meilleure d’entre elles l’éloge assez banal qu’elle ressemblait à un être humain métamorphosé en bois, non seulement au physique, mais au moral ; par exemple, à l’égard d’aucune la réciproque n’eût été vraie.
— Mon cher ami, dit Copley, faisant allusion à l’habileté d’exécution que dénotaient tous ces bustes, vous êtes d’une adresse surprenante, et j’ai rarement rencontré dans votre spécialité un homme qui pût se vanter de vous égaler. Tenez, il manque bien peu de chose à cette figure du général Wolf pour lui donner la vie et l’intelligence.
— Vous croyez peut-être me faire un grand compliment, monsieur Copley ? répondit le sculpteur, tournant le dos, avec un dépit mal déguisé, à la statue du général ; mais depuis peu de temps, une lumière s’est faite dans mon esprit. Je sais maintenant aussi bien que vous ce qui manque à mes figures, et qui est cependant si important qu’elles ne sont rien sans lui, je sais enfin qu’il y a la même différence entre mes œuvres et celles d’un artiste inspiré, qu’entre le barbouillage d’une enseigne et la meilleure de vos toiles.
— C’est incroyable ! s’écria Copley, considérant la figure de l’artiste qui, d’ordinaire peu expressive, rayonnait ce jour-là d’intelligence, que vous est-il arrivé ? et comment se fait-il qu’avec des idées comme celles que vous venez d’exprimer, vous n’ayez pas encore produit d’autres œuvres que celles-ci ?
Le sculpteur sourit sans répondre. Copley se tourna de nouveau vers les statues de bois ; mais, tout en comprenant