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LA CATASTROPHE DE M. HIGGINBOTHAM

— Eh bien ! dit-il, alors donnez-moi des dernières nouvelles de l’endroit que vous venez de quitter. Je ne tiens pas plus à celles de Parker’sfall qu’à celles d’un autre pays. Qu’allez-vous m’apprendre ? j’écoute.

Ainsi pressé par Dominique, le voyageur, qui paraissait aussi peu soucieux de rencontrer un compagnon dans ce bois isolé que d’autres en auraient été satisfaits, hésita comme s’il cherchait ce qu’il allait répondre ; puis montant sur le marchepied de la voiture, il murmura à l’oreille du colporteur les paroles suivantes qu’il eut pu crier de toutes ses forces, sans crainte d’être entendu par un autre que lui :

— Je me souviens d’une nouvelle assez insignifiante. Le vieux M. Higginbotham, qui habite Kimbalton, a été assassiné dans son verger hier soir, vers huit heures, par un Irlandais et un nègre ; ils l’ont pendu à un poirier de Saint-Michel et on ne l’a trouvé que ce matin.

Après avoir débité cette horrible histoire, l’étranger se remit à marcher avec plus de célérité que jamais, sans même tourner la tête à l’offre que lui fit Dominique de fumer un cigare espagnol, en lui racontant les particularités de ce tragique accident. Le colporteur siffla sa jument et se mit à gravir la colline en réfléchissant au malheureux sort de M. Higginbotham, auquel il avait vendu quelquefois du tabac en feuilles ou en carotte. Une chose l’étonnait surtout, c’était le peu de temps que la nouvelle avait mis à se répandre, Kimbalton étant environ à soixante milles en droite ligne, le meurtre avait été commis seulement la veille à huit heures du soir, et cependant Dominique l’avait appris à sept heures du matin alors que, selon toute probabilité,