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Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/204

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air si stupide et si impuissant, que c’était vraiment risible. À cette vue, celle qui les avait traités si grandement commença à rire aux éclats, et fut imitée des quatre jeunes filles, puis des vingt-deux valets porteurs des plats, et de leurs vingt-deux aides employés à verser les vins. Plus ces derniers se laissaient aller à leurs joviales dispositions, plus stupides et plus engourdis devenaient ces hommes repus et boursouflés. Alors cette femme éclatante de beauté se plaça au milieu de la salle, et, étendant une baguette légère que sa main ne quittait jamais, mais que ces êtres brutaux n’avaient point observée, elle la promena de l’un à l’autre, jusqu’à ce que chacun d’eux en eût ressenti l’influence mystérieuse. Sa figure était ravissante de charmes : un sourire se répandait sur ses traits. Pourtant il y avait en elle un certain air de malice, qu’on n’aurait pas trouvé même chez le plus repoussant des reptiles. Malgré l’état d’hébétement absolu dans lequel ils étaient tombés, les voyageurs rassasiés furent néanmoins capables de soupçonner qu’ils étaient au pouvoir d’une malfaisante enchanteresse.

« Misérables ! s’écria-t-elle, vous avez abusé de l’hospitalité d’une femme. Jusque dans cet appartement, destiné à des fêtes de prince, vous vous êtes comportés comme dans une étable à pourceaux. La forme humaine seule vous distingue de ces viles