Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/324

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Cette fois, il n’y eut pas parmi les feuilles une agitation aussi générale. Mais quelques instants après, Jason observa que le feuillage d’une grande branche frémissait au-dessus de sa tête, comme si le vent l’eût particulièrement choisie pour la secouer, tandis que les autres parties de l’arbre étaient dans un calme complet.

« Coupe-moi ! dit la branche aussitôt qu’elle put parler distinctement ; coupe-moi ! coupe-moi ! et me donne la forme d’une tête pour orner ta galère. »

En conséquence, Jason prit la branche au mot et l’eut bientôt tranchée. Un sculpteur des environs fut engagé pour exécuter le travail. C’était un assez habile ouvrier, qui avait déjà taillé en bois des figures prétendues de femmes, à peu près dans le genre de celles que nous voyons de nos jours scellées aux beauprés des navires, avec leurs grands yeux fixes, qui ne clignent jamais sous le choc des flots écumants. Mais, par un phénomène étrange, l’artiste reconnut qu’un pouvoir invisible lui guidait la main, et que ses outils avaient exécuté cette œuvre, à la composition de laquelle il était étranger, avec une perfection dont il s’avouait lui-même incapable. L’ouvrage, une fois terminé, représentait une belle et gracieuse femme, la tête coiffée d’un casque d’où s’échappaient de longues boucles de cheveux ondulant sur ses épaules. À son